François Coppée n’est pas andouille
Parodiée versificateur
Plat et sans génie zélateur
De morale foutrement nouille

Il est poète de la fouille
Vide minutieux narrateur
Des caprices du Créateur
Drames du vice et de la trouille

Il rime nourrice ou souillon
Qui prend force coups dans la gueule
Puis va chez les Soeurs crever seule

Foin de l’art ou d’autre ambition
Qu’une fabulation dernière
Aux humbles l’unique prière

31. François Coppée

L’affliction n’est pas ridicule
(Qui veut effacer le pathos ?)
Elle appartient à l’homoncule
(Nos vieilles larmes à Porthos)

Le ridicule est une veine
Intarissable à exploiter
L’enfance rit de la déveine
De son ample malheur ouaté

Le désir fait luire la tette
Le sexe est un dieu sans besoin
L’aire de jeu tout juste prête
Où l’indocile ouvre son poing

(Un lit vaut moins qu’une baignoire
Où plonger son corps dérisoire)

30. Adília Lopes

Que ne suis-je Amélie Nothomb
Pour payer toutes mes factures
(Une version mâle notons)
Et m’endormir sans courbatures

Encore plus fort au hasard
Malgré les outrages de l’âge
Que ne deviens-je Eden Hazard
(Un nouveau cycle en mon garage)

Pour un max de yens de pesos
Jolie cabane new-yorkaise
Le boss des boss c’est Jeff Bezos
(Filons brols à la foule niaise)

Assez assez de Mallarmé
De ses poèmes seuls armé

29. Revirement

Il s’engage dès la poubelle
Triant consciencieux ses déchets
Signant pétitions s’il échet
Réclamant existence belle

Il est un tantinet rebelle
Par rejet du colifichet
Violente diatribe au guichet
Golpe véloce pour sa belle

Il se sait coupable de tout
De boire ou respirer partout
D’ingérer boeuf salade ou fraise

De contrevenir au grand tout
Sans s’empêcher d’être toutou
Implorant une heure de baise

28. Citoyen

Je n’irai pas à la partouze
Avant d’avoir fait mon devoir
D’avoir pu la fin entrevoir
Es decir le nombre 112

Dussé-je m’enfuir à Pérouse
Pour clore mon univers noir
Y courir nu en désespoir
Et pactiser avec l’Empouse

Dussé-je croupir au Ghana
En relisant Christophe Hanna
Ou métaphorisant la glaise

Pour quelque pensum textuel
(Parole ! rien de sexuel)
Vain tombeau de Jean-Marie Gleize

27. Injonction (l’ordre littéraire)

La chose qui importe est peut-
Être d’écrire ce sonnet
Ou tels autres vers de benêt
Jetés comme faire se peut

Gabriel Marc subsiste un peu
Pour deux quatrains et deux tercets
(Sizain de sylphide en corset
Marotique sauve-qui-peut)

Une femme dépoitraillée
Un tubard à voix éraillée
Ivres dans un café chantant

Des bouquins sur un quai de Seine
Des gambettes vite sur scène
Et c’est tout Paris un instant

26. La chose importante

Je ne réclame à Sainte-Beuve
Aucune pensée un rien neuve
Ni l’orgueilleux poids d’une preuve
Ni l’infect succès dans l’épreuve

Le ratage aimante mes pas
Du berceau jusques au trépas
À Genk ou Tegucigalpa
Je procrastine n’est-ce pas ?

Je sais ne rien rimer qui vaille
Pour l’avant-gardiste piétaille
Plutôt Margot t’ôter la maille

Te rendre hommage avant demain
Paumes sous l’Uniqlo carmin
Inventant poème et chemin

25. Sainte-Beuve (procrastination)

Elle n’a pas besoin de failles
Elle peut très bien s’en passer
Pas de goût pour ce qui déraille
Ni les brûlures du passé

Elle étire dans l’écriture
Les fragments acides du temps
Sans que ce soit tic ni posture
Elle aime jouir tout autant

Elle sort l’âme de sa gangue
Lui préfère un embrasement
Elle veut vivre langue à langue
Le plus cruel déchirement

L’éreintement d’une vie sage
En ses muscles rigueur et rage

24. Cécile Coulon

Son élégie est usuelle
Une humble tâche manuelle
Impliquant doigts papier crayon

Son élégie est amicale
La journée joueuse ou bancale
Pluie et du soleil un rayon

Il connaît peu mais la lumière
La mer et le sel des marais
L’inquiétude dans les guérets
La paix dans la Grande Brière

Il se plaint peu mais la prière
A la courtoisie du galet
L’humanité sans chevalet
Y est le verbe avant poussière

23. Yvon Le Men

Tu lis en juxtalinéaire
Les Sonnets de Leontia Flynn
Une fraternité plénière
S’instaure avec l’âme d’un djinn

Belfast non la littérature
Suffit nul besoin de Belfast
Pour que s’enlève la parure
Que se soulève le ballast

Que l’époque s’écrive en rides
Et consigne erreurs et douleurs
Dans le ciel habité ou vide
Fait défaut toujours la chaleur

Tu la prends aux mots qui trépignent
Avides de chaos et signes

22. Leontia