Vous aimez la poésie ? (2/2)
« Elle est où, la poésie ? » m’étais-je donc demandé avant-hier, dernier jour du mois de septembre, sur le perron des Célestins. Mais l’entre-deux, comme toujours, est salutaire. Quelque prière, dans l’interstice des mois, dut parvenir à Hermès cette nuit-là. Car le lendemain soir, premier jour d’octobre, j’ai vu la poésie descendre sur Lug-Dunum.
C’était le visage d’un ange regardant amoureusement une femme. Le visage arc-en-ciel d’un ange femme prenant toutes les teintes de l’émotion. C’était un regard vaste et ardent d’où sourdait une vie triomphante.
Mansfield.TYA, pour sa première venue à Lyon, jouait à guichet fermé au Marché Gare. Et dans la petite salle destinée aux concerts intimes, l’heureuse assemblée pleurait.
La tension artistique qui unissait les deux femmes, imposée dès l’ouverture par leur interprétation ensorcelante de « Cerbère » et renforcée par une scénographie aussi sommaire que brillante (un titre chanté face à face, les yeux dans les yeux ; un autre chanté dos à dos ; un troisième assis comme pour un quatre mains au clavier) affluait par ondes palpables vers un public conquis. Depuis que Wisielec me l’avait fait découvrir, après quatre ans d’écoute subjuguée, voilà qu’il m’était donné la chance de recevoir de plein fouet la voix indomptable de Julia Lanoë, cette âme doublement sensible et facétieuse, débordant d’auto-dérision, qui anime les Sexy Sushi et Mansfield.TYA.
Et les yeux fermés, emportée par la joie, je pleurais.
Non, la poésie n’est pas morte. La poésie n’a pas quitté ce monde. Elle est simplement là où on ne l’attend pas. Et si elle rend parfois visite aux temples établis, elle est souvent à l’œuvre dans les coulisses et dans les marges, là où se créent dans le secret les classiques de demain.
La poésie, aujourd’hui, c’est Mansfield.TYA.
Merci Clara, merci Julia.
Et à demain.