Vanité
Rien au début. Ni jour, ni ténèbres, ni temps.
Et puis subitement, le magma de nuits,
L’odeur, la haute mer, le limon nu,
Le bruit vil des pas qui précipitent
Les craintes et les plaintes rauques
Des furieux morts au combat,
Cri du sang qui résonne,
Sur le sable encore,
Et que transmet
L’ému barde
Qui sait
Dire
Sans gré
Et sans garde,
À mots mimés,
La folie des morts
Qui psalmodient et tonnent
Leurs impétueux ébats,
En abjurant leurs faces glauques,
Eux qui, comme nous, par le coït
Crurent à l’acmé d’un sens absolu,
D’un âge d’or éclairant l’amer ennui :
Ce « Rien » qui s’écoule et que l’on nomme le temps.
(Illustration : Peinture @Christine Heppe)