6. Une rencontre du côté de la Yellow River

On n’est pas parti depuis très longtemps, on est du côté de la Yellow River, et on entend une série de chocs sourds sous la voiture. Je pile. On se retrouve dehors dans la chaleur à revenir à pied vers un gros sac de poils mouillés : un ragondin.

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5. Crevettes proustiennes

Comme on a tout notre temps, on prend le chemin des écoliers le long de Choctawhatchee Bay, et on fait une pause dans un petit port de pêche où à l’époque de mes vaches maigres — j’étais jeune et fringant alors mais sans un sou, c’était de retour du Nam — j’ai trimé sur le chalut d’un armateur cubain, pour la crevette. Comment c’était, le nom de ce bateau, déjà ? Peu importe. Dans ce bled aux toits crépis par le guano de mouettes, rien n’a vraiment changé depuis les Seventies. Mais surtout, ce qui me saute au visage, c’est l’odeur. La putain d’odeur de crustacés. La madeleine de Proust trempée dans le thé, à côté, c’est du Chanel.

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4. Des voitures

A nouveau sur la route... J’ai beau croire bien connaitre les européens, ils m’étonneront toujours. Ainsi de la fascination de Cammy pour les voitures américaines. Il se montre enchanté d’être mon passager dans mon pickup Ford 150-F — un modèle démodé —, et lors d’une pause il l’immortalise avec ferveur. Il me demande aussi de ralentir, ou même de m’arrêter, pour pouvoir photographier à son aise des panneaux routiers, des pompes à essence, des motels : tout ce paysage qui de mon point de vue est d’un ennui mortel. Ça doit lui rappeler des films ou des séries TV.

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3. Poisseux

C’est vraiment la série noire, même si j’ai connu pire. En roulant hier à tombeau ouvert sur la piste, Connie a méchamment fusillé un soufflet de cardan. Aujourd’hui, Zack et Everett n’ont rien fait d’autre que chercher la bonne pièce dans des casses, puis réparer, couchés dans l’ornière sous le véhicule. Faut encore que ça soit moi qui leur dise de changer la paire complète de cardans parce que c’est comme ça qu’on doit faire, puis de contrôler les rotules, tant qu’ils y sont.

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2. Comment ne pas museler un alligator

L’impression que j’ai, presque depuis la naissance de Zack et Everett il y a quarante-trois ans, c’est qu’ils sont lancés comme deux balles de fusil à canons juxtaposés en direction de la même et unique cible : la plus énorme connerie à faire à deux. Comme il est né une minute et demi avant Everett qui poussait derrière lui dans le noir, Zack, en tant qu’ainé et jumeau dominant, est toujours celui qui ouvre la voie du désastre où ces deux abrutis s’engouffrent en chœur. Comme si leur existence n’était destinée qu’à illustrer ce que dit Veblen, dans sa "Théorie de la classe de loisir", au sujet du goût têtu de l’américain moyen pour la prouesse sportive aussi ostentatoire qu’inutile et désespérante. Chacun sur cette terre a sa croix, les jumeaux sont la mienne. Ordinairement, ça se termine aux urgences, ou derrière les barreaux d’une cellule en compagnie d’Indiens séminoles ivres morts ou de mineures cubaines, plus ou moins putes, qui les insultent en espagnol et leur crachent au visage sous le regard désabusé du sheriff du comté.

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Photo Blog Truxton Orcutt 1

1. Cammy

Quand Camille a débarqué chez moi, j’essayais de me motiver à vider mon garage, mais je n’arrivais pas à m’y mettre. C’est fou ce qu’un type de mon âge, et sans femme, peut accumuler comme merdes. Camille Delatour, photographe de guerre, est un vieux pote de lycée du nouvel éditeur de Jérôme Delclos, mon traducteur français. Comme Camille, qui est venu en Greyhound de Miami via Orlando puis Jacksonsville, s’est arrêté en chemin pour acheter un pack de ma marque, on a tout de suite sympathisé, et les cadavres de Miller Lite sont venus tenir compagnie aux autres dans le dépôt.

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« Una penultima », ô divin marquis

« This is the end, beautiful friend…» Voici donc venue la fin de ma résidence et comme je n’aime pas l’idée d’un « dernier billet », je puiserais plutôt au souvenir de mes nuits madrilènes pour vous haranguer ainsi : lecteurs insatiables, ô mes amis, prenons ensemble « una penultima » ! Et cette penultima, figurez-vous, c’est ce feu d’artifice auquel j’ai eu la chance d’assister hier soir, au théâtre antique de Fourvière : une lecture du marquis de Sade par la fabuleuse Isabelle Huppert. Belle coïncidence, n’est-ce pas ? Quel meilleur auteur que le divin marquis pour tirer ma révérence ?

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Quand j’entends le mot littérature…

Dans l’éditorial de la dernière livraison du Matricule des Anges, au demeurant fort sympathique, comme de coutume, Thierry Guichard esquisse un parallèle empreint d’optimisme qui me semble nécessiter quelque tempérance. « Aïe, crierez-vous avec raison, encore un billet pointilleux et intello. » Pointilleux est le mot juste, tant ce qui suit est moins une critique du susdit éditorial qu’une intention d’approfondissement. Mais écoutez, amis poètes, écoutez.

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Le Sucre est-il bon pour la santé ?

Il y a eu un moment fort intéressant au Sucre hier soir, au début de la « Closing party » des Nuits Sonores, lorsque le ministre de l’Intérieur et maire-sénateur de Lug-Dunum nous a fait l’honneur de nous rejoindre sur le roof floor : une quinzaine de festivaliers assis en terrasse ― la plupart, soyons honnêtes, drogués depuis trois jours ― se mirent à l’applaudir.

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Vanité

Tiens, j'ai découvert Scribay. Le poème qui suit est ma réponse à un défi. Comment dites-vous? Pas de quoi nourrir un billet ? Allons, il s'agit d'un poème, il s'agit de l'infini.

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